Le mot d'Autrui sur les attentats de Paris : Offrons aux terroristes des fleurs

Nous sommes le lundi 16 novembre 2016 au Boulevard la République, trois jours après les attentats terroristes à Paris. Martin Weill, l'envoyé très spécial du "Le Petit Journal" (émission d'information de la chaîne Canal +) tend son micro à un enfant de quatre à cinq ans accompagné de son père, venu rendre hommage aux victimes des attaques de vendredi 13. La terreur est à son comble dans toutes les rues de la capitale française. Et même les plus jeunes habitants de la Cité comprennent ce qui est en train d'arriver. La conversation à trois, entre le journaliste, l'enfant et son père, témoigne de ce que, au-delà des morts et des centaines de vies décimées, les terroristes ont réussi à semer dans notre quotidien : la PEUR. Ce père de famille tente désespérément de faire croire à son fils scandalisé et meurtri par l'horreur qu'il a vu, qu'il est toujours possible que tout soit comme avant. Qu'il lui sera possible de grandir tranquillement et d'aller à l'école sans crainte de se faire tirer dessus par de jeunes fous désorientés et endoctrinés qui tuent au nom d'une religion...

- Oui parce qu'ils sont très, très méchants. Les méchants, c'est pas très gentil les méchants... Et il faut faire très attention, parce qu'il faut changer de maison
- Mais non, t'inquiète pas. On n'a pas besoin de changer de maison. C'est la France notre maison...
- Mais il y a les méchants, papa...
- Oui, mais y a des méchants partout... Y a des méchants partout
- Ils ont des pistolets et ils peuvent nous tirer dessus parce qu'ils sont très méchants, papa...
- Bah eux, ils ont des pistolets, nous, on a des fleurs...
- Mais les fleurs, ça fait rien. C'est pour, c'est pour, c'est pour euhhh...
- Ben regarde, y a beaucoup de gens qui déposent des fleurs...
- Oui !
- C'est pour combattre les pistolets...
- C'est pour protéger ?
- Voilà !
- Et les bougies aussi ?
- C'est pour ne pas oublier les gens qui sont partis
- c'est pour nous protéger, les fleurs et les bougies ?
- Ouais !
Et sans doute pour ramener son père très peiné, l'enfant conclut la petite interview en se disant rassuré.

Il faut dire les choses telles qu'elles se présentent à nous. Tenter de couvrir la réalité par des discours optimistes n'y fera rien. L'avenir du monde est déjà dessiné et il nous faudra vivre le restant de nos jours avec la terreur. Bombarder le ou les sièges de l'Etat islamique n'y fera rien. C'est comme qui dirait, donner un coup pied dans un essaim. L'ennemi n'a jamais été aussi proche de nous. C'est notre enfant, notre frère de sang, notre cousin... C'est le fils du voisin, c'est l'ami d'enfance avec qui nous avons tout partagé... C'est la fille d'un ami ou d'un parent, c'est le jeune timide du quartier, c'est le petit délinquant repenti du coin, qui croit avoir trouvé la bonne voie...
Gouverner, c'est prévoir, a-t-on l'habitude de dire. Seulement nos dirigeants ne savaient pas que le 21e siècle serait celui de la spiritualité. Les jeunes sont de plus en plus attirés par la quête de leur véritable essence. Et nos gouvernants ont lourdement péché dans leur politique d'éducation en ignorant ou en excluant tout simplement le thème religieux des programmes scolaires pour instaurer une laïcité dont ils ne maîtrisent même pas les contours. Les textes religieux, les Ecritures Saintes n'ont jamais été faits dans le but de terroriser une société quelconque. Mais tout est dans la liberté de l'interprétation de certaines parties du Coran, de la Bible ou du Thora. C'est des Livres remplis de passages évoquant l'amour que l'homme doit avoir pour son prochain. Mais c'est également des Livres dont les véritables sens des Versets peuvent prêter à confusion. Surtout ceux qui évoquent la division ou la différence entre les différentes religions abrahamiques. Nous avons laissé des gens mal intentionnés, profiter de la fragilité socio-économique de certaines couches de nos sociétés et du manque de repères de nos enfants, frères et amis, pour instaurer une nouvelle vision de l'Islam. Celle-là même qui ordonne à un musulman dit radical de tuer toute autre personne qui ne partage pas la même croyance que lui. Une nouvelle vision de l'Islam qui n'accepte pas l'autre en tant qu'individu différent et source de richesse. Une nouvelle vision de l'Islam qui n'a jamais été enseignée par le Prophète Mohamed (PSL).
Et maintenant que le mal est déjà fait, l'on voudrait nous faire croire que le problème ne pourrait être résolu que par les armes. Je ne suis pas fan des théories complotistes, mais si à chaque fois qu'un drame de ce genre survient, c'est l'industrie de l'armement qui s'en tirent avec les poches remplies, il est peut-être temps pour nous d'orienter notre réflexion sur la véritable cause de cette situation actuelle que vit le monde.
Je vais revenir sur la discussion entre le papa désespéré et son enfant meurtri pour dire que sa théorie des fleurs contre les pistolets n'est pas tout à fait absurde. Paris a reçu une grosse gifle vendredi 13 novembre 2015. Et Paris doit tendre l'autre joue à Daesh pour montrer qu'il n'a pas peur. Et comment ?
Il faut que chaque citoyen européen, américain, asiatique ou africain en fasse son sacerdoce. Retourner auprès de nos enfants, de nos frères, de nos amis, de nos cousins et cousines, pour leur montrer combien on tient à eux, pour leur dire combien on les aime et combien nous avons été fautifs de les abandonner à leur propre sort face aux nouveaux colonisateurs de cet Etat qui se dit islamique.
Offrons leurs des fleurs, montrons leurs notre détermination à changer les choses non pas par la force des armes, mais par celle du dialogue. Offrons leurs des fleurs et parlons leurs de l'importance de l'amour du prochain aux yeux de Dieu. Offrons leurs des fleurs et discutons ensemble des principes de chaque religion. Offrons leurs des fleurs pour qu'ils sachent que nous n'avons pas peur. Offrons leurs des fleurs parce que seul l'amour peut triompher du mal...

Je cautionne la réaction politique de la France qui bombarde les emplacements stratégiques de Daesh en Syrie depuis des jours. Mais encore une fois l'ennemi est sous nos toits, en face de chez nous ou à quelques pâtés de maisons. La probabilité que d'autres drames du genre surviennent s'est même transformée en certitude dans nos têtes. Et dès lors qu'on franchit le seuil l'inévitable, la peur n'a plus de sens, comme aime tant à le rappeler Coelho. Alors offrons leurs des fleurs !!!

Par Autrui