Jugez-moi, mais seulement après avoir lu entièrement mon histoire...


Au cours de ce récit, j'aurai parfois l'air d'un démon. Mais dans certaines séquences, je ressemblerai un tout petit peu à un ange. Je vivais avec un homme dont je tairai le nom. Il m'aimait et s'efforçait chaque jour de me le prouver. Dès l'aube, avant mon réveil, je pouvais sentir son attachement à notre relation. Et il en était ainsi tout au long de la journée.

Jour après jour, année après année, ces petites marques d'attention se multipliaient et produisaient un effet d'ennui chez moi. Je feignais d'aimer ses caresses, ses câlins, ses cadeaux, ses petits poèmes...mais au fond, il me saoulait avec cet amour qu'il affichait dans tous les coins et recoins de la maison. Chaque objet, chaque meuble et chaque mur de chaque appartement de la demeure conjugale me rappelaient combien cet homme m'aimait. Je n'en pouvais plus. J'étouffais dans ce cadre luxueux que ma passion pour l'aventure transformait en un lieu sinistre.

Mes envies d'ailleurs, je ne pouvais plus les contrôler. C'était une question de jours avant que ce fond ne remonte à la surface pour balayer mon équilibre, ma tranquillité et la paix de mon foyer. J'avais peur, très peur de devoir inéluctablement tourner le dos à la stabilité et de se lancer dans une passion où je serais, cette fois-ci, la plus faible.

Je me suis alors dégoté un "péché" appelé Edouard. Un jeune homme très charmant que j'ai croisé un jour en allant faire mon jogging matinal. J'ai tout de suite flashé sur son physique. Elancé, robuste et beau gosse, il était l'attraction de toutes les jeunes filles qui venaient brûler quelques calories au parcours sportif. Mais il se dégageait de son expression faciale, un calme et une sérénité qui repoussaient les prétendantes surexcitées, que je considérais déjà comme des rivales. Je décidais alors de passer à l'attaque, oubliant que j'étais une femme mariée.

Nos premiers échanges, Edouard et moi, tournaient essentiellement sur les entraînements. Il adorait me voir en jogging.
- "Une femme qui respecte autant son corps est une chance pour l'environnement. Parce que seules les femmes peuvent prendre bien soin de la planète. Les hommes ne font que parler et la plupart du temps, ils consacrent leur énergie à bien d'autres choses", disait-il.
Une opportunité inespérée pour moi d'exploiter sa dernière phrase :
- "Et toi, comment passes-tu la plupart de ton temps ?", demandai-je avec un air provocateur
- "A tuer des femmes"
J'ai décrypté un air de vérité dans la spontanéité de sa réponse. Mais il ne pouvait pas être sérieux, me suis-je dit avant qu'il n'enchaîne :
-"Je traque les belles femmes, les rend complètement dingues de moi et ensuite j'éprouve un plaisir sans nom à les tuer..."
Mais il me rassura ensuite :
-"Voyons, je blague bien sûr... Qui pourrait faire du mal à d'aussi ravissantes créatures ? Je suis professeur de Philo au lycée"
"Ah bon ? Ben moi, je préfère les psychopathes aux philosophes, vois-tu".
Il éclata de rire et là j'eus une terrible envie de l'embrasser. Mais je puis retenir ma pulsion. Il me demanda ensuite ce que je faisais dans la vie, à part m'occuper de mon corps. Je lui dis tout sauf que j'étais mariée à l'un des plus riches hommes de la ville...

Les jours passaient et ma passion pour Edouard devenait de plus en plus incontrôlable. Je faisais l'amour avec mon mari en voyant son visage et surtout en songeant à son corps et ses muscles de rêve. Mon époux pensait certainement que mon activité intense au lit était due à l'amour et à l'envie que j'ai pour lui. Il ne pouvait pas imaginer que j'utilisais son corps pour fantasmer sur Edouard.

Deux semaines après notre première discussion, Edouard décida de m'inviter à déjeuner chez lui. Je ne pouvais pas refuser une telle opportunité. Alors j'acceptai sans sourciller. De toute manière, je ne risquais pas grand chose puisque mon mari était en voyage d'affaires aux Etats-Unis.
Je mis une courte robe noire qui dévoilait parfaitement l'éclat de ma peau. Je pris un taxi pour n'éveiller aucun soupçon et me rendis chez mon "péché". Il m'ouvrit la porte et m'accueillit avec une bise sur chacune de mes joues. Il vivait dans un quartier populaire de la banlieue dakaroise, dans un modeste appartement, mais très propre et assez convenable.

Il avait commandé du riz au poisson rouge chez l'une de ses voisine. Le repas n'allait pas tarder à être servi. Mais avant, il m'a parlé de ses anciennes relations qui ont toutes abouti à la déception. Je pense que c'était une façon pour lui de m'ouvrir la porte de son coeur. Lorsqu'il en termina avec sa dernière aventure, je sentis que c'était mon tour de s'épancher sur ma vie sentimentale. Je lui racontais qu'après avoir été trahie par mon premier amour, je nageais d'aventure en aventure, sans jamais s'engager dans une vraie relation sérieuse, de peur de revivre le même événement.
Le décor était donc bien campé. Nous étions, l'un dans l'imaginaire de l'autre, deux êtres trahis en quête d'aventure. Le prétexte du rancard était le déjeuner. Mais je me rappelle être sorti de l'appartement vers 19 heures, le ventre vide, après avoir passé tout l'après-midi à s'envoyer en l'air avec cet homme qui savait si bien le faire...
Ainsi, rendez-vous après rendez-vous, déjeuner après déjeuner, j'étais complètement folle et accroc à Edouard.

Mon mari ne se doutait toujours de rien. En tout cas, il n'avait rien changé de ses habitudes. Je recevais toujours des cadeaux au retour de ses voyages ou après avoir conclu une bonne affaire. Il était également toujours aussi attentionné envers son épouse chérie. Dans ma peau, je me sentais coupable de trahir un aussi aimable époux, même si mon coeur était en fête, à chaque fois qu'Edouard me touchait. J'avais cruellement peur de perdre le confort de mon domicile conjugal et affreusement inquiète que mon amant découvre que je suis une femme mariée.
Mais comment pouvais-je savoir que c'est mon mari qui avait engagé Edouard pour me séduire et coucher avec moi ? Ce matin, quand j'ai vu mon amant sortir de la limousine de mon mari avec une enveloppe kaki, certainement remplie de billets de banque, j'ai d'abord pensé à une coïncidence. Mais après, il fallait se rendre à l'évidence, j'étais déjà prise dans un engrenage dont il semblait impossible que je me tire indemne.
La première question que je me suis posée est : Pourquoi ?
En fait, pourquoi mon mari avait-il besoin de faire tout ce cirque, s'il voulait simplement se séparer avec moi. La réponse était évidente à mes yeux : il ne voulait pas que je touche un kopeck de sa fortune. Lui, qui avait fait un si long chemin pour mettre sur pied son empire et se hisser dans le cercle restreint des milliardaires du pays. Mais vous ne devinerez jamais. J'étais totalement à côté de la plaque. Mon analyse était fausse. Mon mari ne voulait pas des preuves vidéos ou photos, pour me jeter hors de sa vie sans un rond.

Depuis tout ce temps, je vivais avec un psychopathe qui jouit de voir, à partir d'un petit trou, sa femme se faire sauter par un autre. En effet, mon mari avait recruté Edouard spécialement pour satisfaire une sale pulsion. Mon amant lui avait conçu un trou spécial dans le mur où il pouvait, à partir de l'autre chambre, nous regarder en train de faire l'amour. Ainsi, il jouissait comme jamais il ne le faisait avec moi, quand nous étions au lit.

Quand la vérité m'a été révélée par ces deux hommes, j'étais d'abord soulagée de n'avoir pas brisé le coeur de mon mari. Ensuite, je me suis sentie souillée, salie et abusée. J'ai pris quelques habits et je suis partie hors du Sénégal. Mais j'ai beau tenté de m'éloigner du théâtre de mon drame, la réalité était toujours présente dans mon esprit et sur chaque partie de ce corps qui n'était, en fait qu'un objet sexuel pour deux individus que je croyais tromper.
J'ai pensé à mettre un terme à mes jours, mais la peur m'a sauvée. C'est alors que j'ai décidé de partager mon histoire avec vous...

Par Autrui

(Photo illustrative : Taniqua Bennett)