Chapitre 8 du "Film de ma descente aux enfers..."


Les jours passaient et les hommes défilaient dans mon appartement les uns plus riches et plus importants que les autres. Puis les semaines, et bientôt je vais entrer dans mon troisième mois de "fonction". Et le plus triste, c'est que depuis tout ce temps, je n'ai reçu aucune nouvelle de ma famille. Pas même de ma chère maman qui m'adorait tant. Dès fois, je m'enfermais toute une journée dans cet endroit en pleurant toutes les larmes de mon corps souillé par des individus, qui n'étaient intéressés que par ce qui se trouvait entre mes jambes. L'ambiance familiale me manquait terriblement. Le sort de ma grande soeur Anna me préoccupait gravement. Je voulais coûte que coûte savoir comment elle parvenait à vivre dans le même lit que cet homme qui l'avait trahie avec sa propre soeur. J'ai tenté plusieurs fois de la joindre. En vain. Je pense qu'elle a changé de numéro de téléphone.

Finalement, je n'étais pas si important aux yeux des membres de ma famille. Cela faisait des mois que j'avais disparu et pas même un avis de recherche dans les journaux que j'achetais chaque jour pour lire les pages "Avis et annonces". Rien. Ou, était-ce une décision prise par mon père qui ne voulait plus entendre parler de moi ? J'étais laissée à mon propre sort, comme une jeune antilope abandonnée dans une forêt totalement hostile, au milieu des félins.
Mais je me défendais plutôt bien. J'avais réussi à tisser une complicité très solide avec Samba le "courtier". Il faut dire qu'il connaissait bien les hommes qu'il me balançait. J'avais toujours un pas d'avance sur eux puisque j'avais leur profil psychologique et leur position dans la société à ma disposition avant de les rencontrer. Des directeurs de sociétés aux ministres de la Républiques en passant par les puissants hommes d'affaires, les commerçants millionnaires... ils passaient tous chez moi pour des parties de plaisirs intenses. Côté finances, je n'avais pas à me plaindre. Mes clients étaient tous d'une générosité sans commune mesure. Dès fois, je recevais même des cadeaux inespérés comme celui de cet homme d'affaires libano-sénégalais, qui après être passé deux fois chez moi, m'avait offert une jolie voiture de marque allemande. Mais je n'avais pas la maturité d'esprit d'ouvrir un compte en banque pour gérer cet argent. Je dépensais tout en shopping après avoir mis de côté l'argent du loyer et la commission de Samba.

Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec "Tigre affamé", le Directeur général d'une des plus grandes entreprises de la ville. Je ne connais pas le nom de sa société. Samba m'a dit qu'il était plutôt du genre autoritaire, mais sans problème. Apparemment, je saurais bien le gérer. Mon téléphone sonne et quand je décroche, le timbre de la voix de mon interlocuteur me foudroie en plein coeur. Cette voix est bien celle de mon père.
- Allô ! Comment tu vas toi ?
Et j'ai tout de suite raccroché le téléphone. Je suis ensuite restée deux minutes sans avoir les pensées stables. Mille et une questions allaient et venaient dans mon esprit. Il a encore appelé une fois, j'ai laissé sonner dans le vide et il n'a pas insisté. Ce n'était d'ailleurs pas son genre d'insister.
Je n'avais pas de doute sur l'identité de mon appelant, mais j'ai quand même appelé Samba pour en avoir le coeur net. Il a détruit l'once de doute à laquelle je voulais m'accrocher en me donnant le nom de la société que dirigeait mon client du jour. J'ai raccroché et tout de suite j'ai eu une pensée triste pour ma mère. Mon père se tapait des "Call-girls" mineures. Cet homme qui nous a toujours prévenu, ma soeur et moi, du danger du monde extérieur, de la cruauté des uns et des autres. En fait cet homme-là nous mettait en garde contre une certaine racaille dont lui-même faisait partie.
Cinq minutes après, Samba me rappela pour me demander pourquoi je ne décrochais pas les appels de "Tigre affamé". J'ai trouvé une excuse pour renvoyer le rencard. Je ne me sentais pas bien, lui dis-je. Et aussi faux que cela pouvait paraître, c'était la pure vérité. J'avais tout le mal du monde à imaginer que mon père faisait partie de ce cercle vicieux de personnalités.

Le lendemain, j'ai pris la folle décision d'aller affronter mon père face à face. Je lui ai envoyé un texto sur le numéro que Samba m'avait donné pour lui fixer un rencard. Mais il n'a pas répondu. Et quand j'ai insisté, il m'a dit qu'il était pris et que je pouvais caler le rendez-vous à un autre jour dans la semaine. En fin de compte nous nous sommes mis d'accord pour le jeudi matin.

Alors comme je n'avais pas programmé de rendez-vous, je suis sortie pour faire les boutiques. Vers treize heures, je me suis rendue à un restaurant de luxe de la place pour déjeuner. Et devinez qui j'ai aperçu au fond avec une jeune fille en train de boire un verre : mon père himself !
Je l'ai tout de suite reconnu avec ses lunettes correcteurs, sa barbe poivre-sel, et son embonpoint. j'ai mis mes lunettes noires et me suis assises dans un coin du restaurant où je pouvais observait mon père et son hôte sans qu'il puisse me voir en retour. Je n'avais plus faim. J'ai alors commandé un verre d'eau gazeuse pour camoufler. Et j'ai failli tomber à la renverse quand trente minutes après j'ai découvert le visage de la jeune fille qui accompagnait mon père. Ils sont passés à quelques mètres de ma table pour quitter le restaurant. C'était Mami, la camarade de classe qui m'avait hébergé chez sa tante pendant une quinzaine de jours quand j'ai fugué.

A suivre...

Par Autrui